Entretien avec George Monbiot
On peut dire que George Monbiot, journaliste et activiste britannique de 60 ans et auteur de nombreux livres, a un parcours hors du commun, guidé par un engagement à toute épreuve. Aujourd’hui éditorialiste du journal de gauche The Guardian, il est l’une des voix les plus originales de la défense de l’environnement.
Diplômé de zoologie, il commence sa carrière en tant que producteur de documentaires sur la vie sauvage pour la radio BBC. Devenu journaliste d’investigation indépendant, il part plusieurs mois en Indonésie pour décrire les conséquences humaines du programme de déplacement des populations, mené par le gouvernement de Suharto avec le soutien des pays occidentaux.
À 26 ans, il débarque au Brésil avec un projet de livre sur l’Amazonie. Il s’engage dans plusieurs mouvements contre l’accaparement des terres des populations indigènes, et entreprend plusieurs enquêtes, qui le mènent sur les traces d’acajous volés dans des réserves indigènes (et retrouvés au palais de Buckingham !) et, plus tard, sur celles d’un agent de police responsable de la torture et du meurtre de paysans militants. En 1992, il s’installe en Afrique de l’Est pour enquêter sur les attaques contre des peuples nomades.
Action et réflexion
À son retour en Angleterre, il s’engage dans l’action directe en manifestant contre la construction de routes ou encore l’importation de bois d’Amazonie. Il relate ses enquêtes dans des livres, des documentaires ou des vidéos en ligne, sur des sujets variés et, parfois, controversés : la participation des citoyens aux décisions sur l’utilisation des terres, l’influence du lobbying économique sur le pouvoir, le réensauvagement, les solutions pour le climat fondées sur la nature (vidéo coprésentée avec Greta Thunberg)…
Son engagement lui a valu de passer près de la mort à plusieurs reprises : tantôt à la suite de piqûres de frelons qui l’ont plongé dans le coma, tantôt après une crise de paludisme, qui l’a conduit à être déclaré cliniquement mort et à subir de terribles séquelles pendant plusieurs années (ce qu’il raconte dans son livre No Man’s Land), mais aussi en raison des nombreux ennemis qu’il a coalisés contre lui au fil de ses luttes. Il a été déclaré persona non grata dans sept pays et condamné à la prison à vie par contumace en Indonésie. Il a été arrêté à plusieurs reprises, notamment lors d’une manifestation avec l’ONG Extinction Rebellion. Et alors qu’il manifestait contre la construction d’une route en Angleterre, des agents de sécurité lui ont percé le pied d’un piquet de clôture.